"MARIE CLAIRE" JUIN 2002

EXTRAITS
DROLES D'HISTOIRE POUR
UNE RENCONTRE

Béatrice et Thierry
Ardisson.
ELLE A 38 ANS, LUI, 53.
ILS ONT TROIS ENFANTS.

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THIERRY : C'était il y a une vingtaine d'années. Pour la première fois de ma vie, je connaissais l'ivresse de vivre seul. J'avais rencontré une twisteuse, Ouamée, avec qui j'écumais depuis trois ans tous les lieux de la nuit parisienne. Il faut dire qu'à 20 ans je m'étais marié avec la plus jolie fille d'Avignon... qui ne supportait pas Paris ! Nous avions vécu ensemble pendant dix ans et un jour, elle était partie... Je rattrapais le temps perdu !

Sur le coup de 3 heures du matin, je sors avec un copain d'une boîte qui s'appelait Le Tango. Au moment de monter dans la voiture, j'aperçois une petite brune avec un mec. Ils sortaient de la boîte. Et là, je vois le visage de la fille, et je croise un regard. Noir, intense, pétillant d'intelligence et de vivacité. Comme allumé.

Ils partaient à pied. Je les laisse un peu s'éloigner et décide de les suivre en voiture. J'arrive lentement à leur hauteur, je baisse la vitre et, plutôt gros lourd, j'interpelle la fille et lui propose de venir boire un verre chez moi. Evidemment, elle refuse. Si j'avais été moins con, peut-être aurait-elle accepté. A partir de cet instant précis, j'avais cette fille dans la peau. J'ai littéralement flashé sur elle. Le béguin! Tous les jours qui ont suivi, c'est à elle que je pensais.
 

 
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. suite du bas de la page      

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Elle avait à l'époque un petit studio au-dessus de chez ses parents, en face de l'Unesco. Je l'invitais à dîner, je la raccompagnais en bas de chez elle. On dînait, je la raccompagnais... Au bout d'un moment, je dois avouer que j'en ai eu un peu marre. Nous dînions au restaurant du Hilton, et j'ai commencé à plaisanter sur le fait qu'elle était une sorte de Bernadette Soubirous, étonnamment peu intéressée par le sexe... Formidable coup de bol : piquée au vif, elle a aussitôt voulu me prouver qu'elle ne s'y intéressait pas aussi peu que je voulais le croire. Et au Hilton, il y a des chambres !

Que dire de plus ? Le premier instant où je lui ai parlé, j'ai tout dit, qui s'est avéré. C'est la femme de ma vie, nous nous sommes mariés, nous avons trois enfants... et ça fait vingt ans que ça dure ! Bien sûr, nous avons dû surmonter des épreuves, des moments où tout aurait pu voler en éclats. Mais cet amour a résisté et, même si la formule semble un peu mièvre, nous nous aimons vraiment comme au premier jour. On s'appelle cinq à six fois par jour, chacun téléphone à l'autre pour tout lui raconter, la complicité est totale, sur tous les plans. Même sexuellement, alors qu'au bout de deux décennies, nous pourrions commencer à en avoir ras-le-bol. Eh bien pas du tout ! (...)    

         

     

THIERRY
ARDISSON
:
« SOUDAIN,
J'APERÇOIS
SUR LE
TROTTOIR
UNE PETITE
BRUNE AU
REGARD
INTENSE.
LE FLASH ! »

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BÉATRICE
ARDISSON :
«"THIERRY
FONCE SUR
MOI ET DIT :
DANS NEUF
MOIS, NOUS
SERONS
ENSEMBLE."»

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photo François Darmigny.      

 

Deux semaines plus tard, j'arrive avec Ouamée dans une autre boîte, Le Privilège. Nous sommes à peine installés... que j'aperçois ma petite brune. Elle était assise dans un coin, un peu courbée en avant, son sac posé sur les genoux. Seule, au milieu de tous ces gens qui faisaient la fête. Je n'ai pas hésité. Je me suis dirigé vers elle : sans doute allait-elle trouver ça complète- ment ridicule, mais je voulais qu'elle sache qu'elle était la femme de ma vie, que nous allions nous marier et avoir des enfants ensemble ! Il n'y avait pas l'ombre d'un plan drague dans ce que je lui disais. J'étais absolument sincère : pour moi, il y avait là comme une évidence. Elle a dû se dire que le gros balourd avait à nouveau débarqué avec ses gros sabots. Et là, Ouamée s'est approchée et, sans le faire exprès, vraiment par accident, a renversé sur elle son verre de tequila sunrise ! Si ce n'était pas de l'intuition féminine... Ma petite brune a donc quitté la boîte, couverte de tequila.

(...) Les choses ont commencé à aller de mal en pis avec Ouamée. Je n'avais que l'autre dans la tête. Quand j'ai appris qu'elle était revenue à Paris, j'ai pris mon courage à deux mains et je lui ai téléphoné, pour lui proposer d'aller boire un verre.
Nous nous sommes retrouvés au bar de La Coupole. C'était notre première "vraie" rencontre. Nous étions tellement intimidés que nous avons dû fumer un paquet de cigarettes chacun. Mes mains tremblaient. Nous n'arrivions pas vraiment à nous parler, la rencontre était trop forte. Nous étions comme interdits l'un et l'autre. Frimeur, je lui avais apporté mon dernier livre, "Louis XX", pour bien lui montrer que je n'étais pas n'importe qui ! Quand nous nous sommes quittés, elle est évidemment partie sans l'emporter. Si elle m'a avoué plus tard avoir été vexée de cet oubli, je l'étais davantage encore !

Un drôle de jeu a commencé. Elle était très jeune, c'était une gamine de 18 ans, issue d'une famille bourgeoise pour laquelle je devais être le loup de Tex Avery, bien catalogué défonce et boîtes de nuit. J'ai dû donc mener une entreprise conjointe de séduction d'elle, et de sa famille ! Heureusement, il y avait sa grand-mère, une quintessence de grand-mère à la Denise Grey, vraiment géniale, qui est très vite devenue une amie et une alliée.

Finalement, le bonbon est passé assez vite, sans trop de difficultés. Béatrice a dû commencer à se dire que mes propos du Privilège n'étaient pas si délirants puisque, trois mois après, j'étais toujours là, à vouloir la voir tous les jours.

paragraphe suivant : 
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BÉATRICE : C'était une nuit du mois d'août. Il faisait une chaleur épouvantable et j'étais sorti du Tango pour prendre l'air. Je portais un petit chemisier Chanel et une jupe beige avec des talons aiguilles noirs, très années 1950. Devant la boîte, il y avait un monde fou et j'ai alors croisé le regard d'un homme qui me regardait fixement et qui a lancé à voix haute: "Il était temps que je recommence à sortir !" Un peu plus tard, alors que je marchais avec un copain en direction du Palace, une voiture s'est arrêtée à notre hauteur et le même homme m'a invitée à venir boire un verre chez lui. Je n'ai pas voulu répondre à ce macho que je n'avais jamais vu de ma vie, et mon copain m'a dit : "Comment, tu ne le connais pas, mais c'est Thierry Ardisson !"

Une quinzaine de jours plus tard, j'étais assise au Privilège en attendant que ma cousine veuille bien arrêter de danser pour partir avec elle quand j'ai vu Thierry foncer droit pour me dire : "Vous êtes la femme de ma vie. Dans neuf mois, nous serons ensemble." J'ai d'abord pensé que c'était un plan ou que des copains voulaient me faire une blague, mais la colère de la fille qui l'accompagnait rendait sa déclaration assez crédible.

On s'est encore croisés sans qu'il se passe rien, puis je suis partie à Londres m'occuper d'une galerie. Il s'est fait tout un film, persuadé que j'étais enfermée dans un pensionnat... alors que je sortais toutes les nuits ! Finalement, il m'a appelée et nous nous sommes retrouvés à La Coupole.

Nous étions de toute évidence troublés l'un par l'autre et nous avons beaucoup bu pour tenter de dissimuler. Nous avons beaucoup parlé, aussi. Il m'a offert son livre. Je l'ai oublié en partant. Il m'a poursuivie dans le métro mais, comme j'avais pris le bus, il ne m'a pas retrouvée.

Sa déclaration d'amour, il me l'a faite sur un bateau-mouche. Ce n'est pas du tout quelqu'un d'expansif et, cette nuit-là, j'ai été profondément touchée quand il m'a simplement dit : "Je voudrais m'occuper de toi." Nous ne nous sommes plus quittés.

Quand je l'ai rencontré, il y avait plein d'articles de lui dans les boîtes, pour la sortie de son livre. Juste avant notre rencontre, je m'étais amusée à en détourner une, et j'avais rajouté sur son visage, des moustaches, des cheveux et une boucle d'oreille. Plus tard, il m'a montré une photo : sans le connaître encore, je l'avais dessiné exactement... comme il était quand il avait 20 ans. C'est troublant, non ?!
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