Médias
Carolis reprend France 2 en main
Le directeur des programmes est remplacé par un homme du président de France Télévisions.

Par Raphaël GARRIGOS, Isabelle ROBERTS
QUOTIDIEN : lundi 22 janvier 2007

Pour n'avoir pas su négocier le virage éditorial entamé par son Fangio de président, Jean-Baptiste Jouy, directeur des programmes de France 2 depuis septembre 2005, a fini samedi dans les décors : viré.

«Impulsion». Un virage éditorial sur France 2 ? Première nouvelle. C'était pourtant la promesse de Patrick de Carolis, martelée depuis son accession à la tête de France Télévisions en juillet 2005 : virage éditorial, rogntudjuuu ! Un an et demi plus tard, en guise de tournant, Laurent Ruquier a remplacé Thierry Ardisson, et Stéphane Bern vit désormais des deniers publics en montant dans l'Arène de France des débats de haute volée (mercredi encore : «Peut-on divorcer à l'amiable ?»). Ah, et aussi, un quart d'heure en plus dans Télématin pour parler culture. Alors que, sur France 3, le virage éditorial s'illustre par Ce soir ou jamais, l'émission culturelle en direct de Frédéric Taddeï, France 2 n'a rien trouvé pour incarner la politique de Carolis. En plus d'une image pas très reluisante, l'audience fait triste mine : 19,2 % de parts de marché en 2006 (19,8 % en 2005) et 18,8 % en décembre, alors que France 2 avait particulièrement misé sur Noël.

Carolis a donc désigné le coupable : à la trappe Jean-Baptiste Jouy. «Il faut une vraie nouvelle impulsion, indique-t-on à la présidence de France Télévisions, il faut accentuer l'identité de France 2 et la différenciation avec TF1.» Jouy, un tocard responsable de tous les malheurs de France 2 ? Pas si simple. «Jouy n'incarne pas le virage éditorial, surtout quand ça va mal !» ironise un salarié de la chaîne publique. «Jouy a sans doute des torts, explique un autre, mais il n'a pas fait les choses dans son coin, la présidence est intervenue sur tout.» Bref, résume-t-on en choeur à France 2 : «Il sert de fusible.» 

En cause : la présidence de France Télévisions. Soit Patrick de Carolis et son aide de camp, Patrice Duhamel, directeur général des antennes. «Ils n'arrêtent pas de dire qu'ils laissent leur autonomie aux chaînes, mais ils ont mis à leur tête des gens faiblards ou divisés pour garder le pouvoir et intervenir sur tout», commente un observateur Ainsi, à France 2, le choix de Jean-Baptiste Jouy avait surpris à cause de son peu d'expérience. Surtout allié à Philippe Baudillon, directeur général de la Deux, qui n'avait jamais travaillé dans l'audiovisuel auparavant. Résultat, commente une huile de France Télévisions : «Après Alexandre Michelin à France 5, c'est le deuxième directeur des programmes de France Télévisions qui saute en un an : ça fait désordre.» 

Clan. Désordre, mais surtout reprise en main par la présidence du groupe public puisque le remplaçant de Jean-Baptiste Jouy est Eric Stemmelen, auparavant directeur de l'harmonisation et de la programmation de France Télévisions. Un membre du clan : c'est lui qui a monté le dossier de candidature de Carolis devant le CSA pour la présidence de France Télévisions. Et la reprise en main ne devrait pas s'arrêter là : selon nos informations, d'autres mouvements devraient avoir lieu très prochainement à France 2, où Stemmelen devrait procéder à des nominations, notamment à la direction de la programmation et à la fiction.

A France 2, certains se grattent la tête : «Pourquoi virer Jouy maintenant ? A trois mois de la présidentielle, c'est curieux.» En fait, c'est la présidentielle le déclencheur. «Ils veulent arriver avec un meilleur bilan devant leur nouvelle tutelle en mai prochain», explique un proche de la présidence. C'est que la très chiraquienne tête de France Télévisions pourrait bien se retrouver en position délicate, quel que soit le gagnant de l'élection présidentielle. «Un bon bilan, tranche un producteur, c'est leur seule chance de survivre à Ségolène Royal ou Nicolas Sarkozy.» 

 

Le site de Libération

 

Pour rappel : Comment Thierry Ardisson a été piégé par Carolis et son équipe
(article de www.tlmp.net)

 

Carolis lauréat 2006 du prix du plus mauvais patron de chaîne (Les Gérard)